La Tour d’Argent : sans doute le plus beau et le plus célèbre restaurant au monde. Une adresse culte, une référence gastronomique. Mieux, une Institution. The Restaurant. Connu, fêté dans le monde entier, inspirant les réalisateurs du film Ratatouille, on s’y presse des quatre coins de la planète pour célébrer les grandes occasions de la vie, le temps d’un dîner inoubliable. Festoyer à cette table mythique c’est, bien sûr, se délecter du fameux canard au sang, des crêpes Mademoiselle, déguster les meilleurs crus au monde, ou encore profiter de la vue renversante mais c’est surtout, excusez du peu, entrer dans l’histoire. « En être », faire partie de ces happy few, côtoyer symboliquement, par-dessus les siècles, ceux qui firent la renommée de cette grande maison. Une pléiade de stars, célébrités, d’altesses, d’esthètes, de plumes littéraires, de puissants (Henri IV, Louis XIV, le président Kennedy, l’empereur Hirohito, Balzac, Proust, Sacha Guitry, Dali, Ava Gardner, Marilyn Monroe, Brigitte Bardot etc.) qui contribuèrent à faire de ce lieu plus qu’un restaurant, une légende. Car il existe quelque chose d’indéfinissable, de mystérieux, de magique qui émane de la Tour d’Argent, et que l’on s’approprie en y dînant. Une part de rêve… Voilà ce qu’est la Tour d’argent depuis des siècles – depuis 1582 – un temple de l’élégance et du raffinement, un phare scintillant sur la Seine illuminant de son prestige Paris et la France. Voilà pourquoi, malgré les siècles, celle qui a mis le monde à ses pieds, reste indémodable, intemporelle. Propriété, depuis 1911 de la famille Terrail, la Tour d’Argent est aujourd’hui dirigée par André Terrail. Un bel homme élégant, moderne, qui épouse parfaitement son époque. Un brillant entrepreneur qui voit grand, vise l’excellence et vient d’offrir à la Tour sa plus belle métamorphose. Comme une incomparable renaissance pour celle qui souffrait d’une image un peu poussiéreuse. Mais comment faire peau neuve sans perdre son âme ? André Terrail, en amoureux de la Tour, a trouvé la recette. Car ce jeune patron a du génie. Il vient d’apporter à la Tour un supplément d’âme. S’appliquant à la faire entrer tout en douceur dans la modernité, qui multipliant les services comme une épicerie fine en ligne, qui proposant une prestation unique La Tour chez Vous (La Tour met sa cuisine au service de vos convives). Il y a trois semaines, André Terrail inaugurait une sublime boutique (ouverte 7 jrs/7) La Petite épicerie jouxtant la Tour et regorgeant de merveilles (foie gras succulent, canard de chez Burgaud, beurre salé à la robe jaune safran, camembert Laurent Dubois – le must -, noix de cajou aux truffes, baba au rhum à se damner, époustouflantes confitures framboise ou fraise mara des bois au champagne, vins exceptionnels etc.) Pour parfaire cette métamorphose, on n’attend plus que le retour des grands esprits et écrivains de ce monde, manière de renouer avec le faste et la féerie intellectuelle des années Claude Terrail, véritable trait d’union entre les nourritures terrestres et les nourritures spirituelles. Dans ce souci de renouveau, et accessoirement pour réaccrocher fièrement deux ou trois étoiles Michelin au firmament de la Tour, il fallait rien moins qu’un nouveau Chef. C’est chose faite. Yannick Franques, un cuisinier surdoué, sans doute l’un des meilleurs de sa génération, au sommet de son art, fait vibrer l’assiette comme personne. On raffole de son Mystère de l’Oeuf, une recette qui tient du miracle culinaire, on se pâme devant sa Langoustine aux graines de Futaba, on pleure de plaisir en savourant les ravioles de foie gras de sa Soupe de lièvre. C’est une cuisine d’une précision époustouflante, inspirée, maitrisée, poétique. Yannick Franques enchante l’assiette et le résultat est irrésistible : le Caneton Mazarine (avec sa tatin de navets) est tout simplement parfait, les Quenelles de brochet sauvage mousseuses, aériennes, exquises. C’est l’extase à chaque bouchée, on est touché par la grâce. Avec son Merlan en croûte de pain inspiré du Bristol, on passe de la surprise à la stupéfaction. Incontestablement, Yannick Franques est un grand cuisinier. Sans parler de son délicieux dessert L’Or noir. De l’Or pour la Tour d’Argent, un fantasme ? Plutôt un défi pour 2021, histoire de remonter sur le podium, de décrocher la médaille d’or, les étoiles Michelin, et la première place dans le coeur des Français…
Vous êtes le tout nouveau Chef cuisinier de la Tour d’Argent. Régner sur les cuisines d’une « légende intouchable » comme La Tour, avec pour mission de la réinventer, d’être l’instrument de sa renaissance, comment relève-t-on un tel défi ?
Le véritable défi n’était pas simplement de venir à la Tour d’Argent, c’était surtout de la respecter. Je ne pouvais pas arriver et déclarer : je vais tout révolutionner ici, je vais faire ma cuisine, je vais enlever le Canard Delair, gommer la Quenelle André Terrail, tout effacer. Ce n’était pas du tout ma vision des choses. La Tour d’Argent est un restaurant chargé d’histoire, il a un héritage, des valeurs, des traditions. Je devais m’inspirer de tout ce qui avait été fait auparavant et réavancer comme ça. C’était la seule attitude possible pour parvenir à une véritable osmose entre passé et présent. Pour ma part, j’aime jouer avec ce côté classique, j’aime restaurer les classiques, les moderniser. Il n’empêche, il ne faut pas perdre de vue que nous avons une clientèle qui vient pour le Foie gras d’oie des trois Empereurs ou le Canard au sang. Cette clientèle a des attentes bien précises et mon rôle est de tenter les satisfaire. Pour moderniser le Foie gras des trois Empereurs, je m’attache aujourd’hui à faire une présentation avec de la gelée, à ajouter une brioche truffée, peut-être une râpée de plus sur le foie gras. C’est ça mon challenge. Réinventer ne signifie pas faire tabula rasa. C’est plutôt donner une envergure nouvelle, renouveler un plat certes, mais tout en respectant son essence. Je ne suis pas venu à la Tour d’Argent, en me frottant les mains et en m’autofélicitant » Génial, on va entendre parler de moi ! » Non, je ne suis pas ce genre d’homme, je n’ai ni ego surdimensionné ni vanité. Ma seule et unique mission c’est de refaire rayonner la Tour, de lui redonner son éclat, cet aura qu’elle a toujours eu. C’est tout.
Alors vous êtes l’homme providentiel ! On murmure que c’est Eric Frechon qui vous a recommandé…
Je ne sais pas si je suis l’homme providentiel ! Mais c’est vrai que c’est Eric Frechon qui a donné mon nom ! Monsieur André Terrail compte parmi ses amis plusieurs cuisiniers. Il ne voulait pas se tromper et souhaitait avoir un avis éclairé sur la question. Il a sollicité plusieurs Chefs pour se faire une opinion. Quand il a demandé à Eric Frechon » Quel Chef verriez-vous à la Tour d’Argent ? » Celui-ci a répondu : « Moi, je verrais bien Yannick Franques. Il correspond vraiment à l’établissement. »
Eric Frechon, le Chef du Bristol, est-ce pour vous un bienfaiteur ? Lorsque je l’ai interviewé pour Le Sens Critique, il ne tarissait pas d’éloges sur vous. Pour lui, vous êtes un grand cuisinier...
J’ai connu Eric Frechon, lorsqu’il était sous-chef au Crillon. A l’époque, j’étais chef de partie. Quand il a repris le Bristol, il m’a appelé pour que je devienne son sous-chef. Je suis resté 8 ans avec lui. Et j’ai gardé un magnifique souvenir de ces années. C’est Eric Frechon qui m’a formé et c’est lui qui m’a incité à passer le MOF (Le concours du Meilleur Ouvrier de France). C’est vrai qu’il a toujours été là pour moi. Il m’a donné sa confiance en donnant mon nom ici…
Pour vous, y-a-t-il d’autres raisons affectives qui vous ont poussé à venir à la Tour?
Lorsque Eric Frechon a donné mon nom à Monsieur Terrail, ce dernier a fait tout le trajet pour venir goûter ma cuisine au restaurant la Réserve de Beaulieu, sur la Côte d’Azur. Je n’étais même pas au courant. La Tour d’Argent, c’était un beau projet et je n’ai pas hésité. Participer au renouveau de la Tour d’Argent, c’était, pour moi, un challenge et une superbe perspective. Qui ne connait pas la Tour d’Argent ? Dans ses films, Belmondo va toujours dîner à la Tour d’Argent ! C’est un établissement mythique. Lorsque j’ai reçu mon contrat dans le Sud, mon facteur m’a dit, en me le remettant : » Ouah, la Tour d’Argent ! » Il avait des étoiles plein les yeux. Cela le faisait rêver. Il s’est promis, lors d’un voyage à Paris, de réaliser ce rêve !
Surtout qu‘il y a aujourd’hui un menu au déjeuner de 105 euros qui reste relativement abordable !
C’est vrai. Mais le vin n’est pas compris dans le menu ! Cela dit, pour que le moment soit festif, car les gens ont envie de se faire plaisir à la Tour, beaucoup commandent le menu de midi, accompagné d’une coupe de champagne.
Cherchez-vous, par ce prix attractif, à attirer une nouvelle clientèle ?
Bien sûr ! A ce propos, je trouve que notre clientèle rajeunit.
Votre mission est de redonner tout son lustre à cette table prestigieuse. Un restaurant qui a gardé ses trois étoiles Michelin jusqu’en 1996 (et perdu sa deuxième étoile en 2006). Dans un premier temps, pour vous, c’est cap sur la deuxième étoile ?
La deuxième étoile, c’est mon ambition bien sûr, mais je ne me focalise pas là-dessus. L’idée c’est d’abord de récupérer toute la clientèle de la Tour d’Argent et que tous repartent contents. Que chacun se dise, j’ai connu La Quenelle André Terrail, aujourd’hui elle a été modernisé et j’ai adoré. C’est cela que je souhaite vraiment.
Vous êtes aux commandes de la cuisine de la Tour depuis décembre 2019. Confinement oblige, vous n’avez exercé que très peu de mois. Avez-vous eu le temps de prendre vos marques ?
En effet, je suis tout jeune dans l’entreprise, je n’ai que 5 mois ! Mais j’ai vite trouvé mes marques. On a très bien commencé, on a fait de beaux chiffres, tout allait à merveille puis malheureusement on a du s’arrêter à cause du confinement. Après, on a dû se réinventer. On s’est concerté, en comité de direction, pour essayer de trouver des solutions. On s’est demandé : que pourrait-on faire durant le confinement que les autres restaurants ne font pas ? C’est comme ça que nous est venue l’idée de La Tour chez vous. On se déplace chez les gens afin de leur faire vivre l’expérience d’un repas gastronomique à la Tour d’Argent comme si ils y étaient. On vient avec tout notre matériel, la nappe, les couverts, l’argenterie, la verrerie de la Tour, notre presse à canard. Il y a un maître d’hôtel, et la brigade mobile sert les hôtes et leurs convives avec le faste de la Tour. On cuisine chez les gens, on dresse les assiettes et si l’on fait le Canard au sang, le serveur fait la découpe du canard à bout de fourchette sans toucher le plat, devant les convives ravis. C’est fabuleux ! On a fait des 8, des 17, des 19 couverts, un peu partout à Paris et même à Rueil-Malmaison. Ce service est proposé à Paris et en Ile-de-France. Parfois pour célébrer l’anniversaire de rencontre d’un couple, ou des dîners romantiques en tête à tête, ou des soupers festifs sur la terrasse d’un client le soir du quatorze juillet avec de grandes tablées. Du coup, lorsque l’on a réouvert le restaurant après le premier confinement, La Tour chez vous marchait si bien que l’on a décidé de continuer de proposer cette prestation.
Depuis que vous avez inventé le concept La Tour chez vous, d’autres grands restaurants vous imitent, j’ai vu un reportage là-dessus au Journal de 20h…
Ah oui ?
Ce n’est pas la première fois d’ailleurs que la Tour innove et inspire les autres restaurants ! C’est grâce à elle que le roi Henri III inaugure pour la première fois à dîner un ustensile nommé fourchette. La fourchette fait alors son apparition en France ! Pareil pour les tasses à café. Les premières viennent de la Tour d’argent. C’est encore la Tour d’Argent, qui, tout à son culte de la courtoisie et de l’élégance, va lancer la mode de la Carte sans prix pour les femmes !
En effet, André Terrail, le premier du nom, fourmillait d’idées. Il a inventé cette coutume qui consiste à confier une Carte sans prix aux femmes et aux autres invités. C’est aussi lui, à l’époque, qui a initié le « Menu déjeuner » chose qui n’existait pas alors dans les grands restaurants.
Aujourd’hui, comment vivez-vous le confinement jusqu’au 20 janvier 2021 ?
On s’occupe activement ! On a ouvert une boutique en un mois et demi La Petite Epicerie située à côté de la Tour. Monsieur Terrail avait envie de créer une petite épicerie. Nous avions un grand local à côté de la Tour. Auparavant, c’était un entrepôt où l’on stockait notre matériel. Nous avons tout vidé et Monsieur André Terrail s’est occupé de la décoration. Aujourd’hui, vous pouvez acheter du café, du beurre, du lait, de la crème, des oeufs, du foie gras, des terrines de campagne, des vins, des canards, des bonbons, des épices, des biscuits, des nougats, des caramels etc. On fait même des mélanges pour l’apéritif, des noix de cajou au thym et romarin, aux truffes. On a du beurre que l’on va chercher à la Chalotterie, à quarante kilomètres d’ici, de la crème, des pots de yaourt et de fromage blanc. Ce n’est pas comme dans les autres magasins, ce sont des produits de la ferme. On essaye vraiment de réduire les circuits. On fait aussi des Jus Tour d’argent (des jus de canard, des jus de viande) en petit bocaux que l’on réchauffe au bain-marie avant de les verser sur la viande. On fait aussi le Canard Tour d’Argent de chez Burgaud pour les fêtes dans un beau packaging. Toujours dans l’optique de développer la marque de la Tour d’Argent, j’ai créé un Canard maturé (après la maturation, il est si tendre que c’est du beurre quand on le cuisine !) On vend ce canard maturé pour les fêtes avec un jus et un sel (et une explication pour la préparation). C’était une façon pour moi de moderniser le Canard Delair. Les gens poussent la porte de cette boutique et sont ravis. Ils font leurs courses chez nous. C’est ouvert 7 jrs/7. On ne voulait pas créer une épicerie trop chère donc on s’est efforcé de proposer des prix raisonnables, des prix accessibles à tous.
Et que proposez-vous d’autre pour les fêtes de Noël et de fin d’année ?
On va faire des plats à emporter spécialement pour les fêtes. Sur la Rôtisserie de la Tour. Mais on ne veut pas livrer chez les gens parce que l’on ne sait pas comment cela arrive. Car si le client ne met pas les plats à réchauffer correctement, ils seront moins goûteux. Donc, on voulait éviter cet écueil.
Le maître des lieux André Terrail, un jeune et brillant entrepreneur de 40 ans, s’attache à rajeunir la Tour. Il vient de crée une E-boutique, le Comptoir de la Tour d’Argent…
Oui, c’est une boutique au sein de la Tour qui propose un service en ligne d’épicerie fine, des coffrets cadeau, des champagnes, des vins, diverses confitures, du thé, des babas au rhum etc.
Pour rivaliser avec les grandes tables de ce monde et séduire une nouvelle clientèle, André Terrail a aussi engagé un nouveau Chef sommelier, Julien Touitou. A seulement 31 ans, celui-ci veille sur la plus belle des collections de vins au monde. 320 000 bouteilles dont des trésors inestimables comme un cognac 1788, un Pétrus 1947, un Château Yquem de 1871 etc. La bouteille la plus chère est à plus de 60 000 euros…. Vendez-vous certaines bouteilles en salle des ventes ?
Oui, et on vend pas mal de vins sur Internet. A La Petite Epicerie, on a une très belle clientèle qui achète de très bons vins. Et même au restaurant, il y a de très belles additions grâce aux belles bouteilles. J’estime qu’on ne parle pas assez de la cave. Tout le monde connait la Tour d’Argent mais pas forcément pour sa cave. C’est une cave exceptionnelle avec des vins plus que prestigieux, c’est l’une des plus grandes de Paris. Il y a 14 000 références sur le livre du sommelier et il est épais comme la Bible. Les serveurs sont obligés de mettre un chevet à côté de la table de restaurant afin que que le client puisse regarder à son aise la Carte des vins. Parfois, cela peut prendre une demi heure avant qu’il ne choisisse le vin ! C’est une cave fabuleuse. Passé par le Meurice, Julien Touitou est un très bon sommelier.
Pour sa Carte, la Tour d’Argent vous laisse-t-elle vous exprimer pleinement ?
Oui, on a une Carte avec d’un côté » L’Héritage » de la Tour d’Argent (avec le Foie gras d’oie des Trois Empereurs, La Sole cardinale). En 1970, Claude Terrail a publié un livre de recettes » La Tour d’Argent », je l’ai feuilleté et j’ai repris les plats. Par exemple le Canard Mazarine est à l’orange, le Canard Marco Polo au poivre vert, le Canard Mac Arthur que j’ai remis au goût du jour, a une sauce poivrade au vin rouge. J’ai fais ces trois Jus à la boutique : orange, poivre vert Marco Polo et Mac Arthur vin rouge. On peut les acheter. C’est trois jus et c’est trois sels (le sel Mazarine est donc orange, le sel Mac Arthur, et le sel Marco Polo) pour accompagner. Je m’amuse un peu sur les plats Héritage que je fais, les nouveaux, comme La Sole cardinale. Je les prépare au goût du jour. On ne les cuit plus comme avant, maintenant on les cuit à juste cuisson, on fait le jus d’écrevisse un peu différemment. A l’époque, quand il y avait les écrevisses, elles étaient entières avec les pinces et tout, c’était à l’ancienne. Je m’amuse à faire goûter les nouveaux classiques à Monsieur Terrail et j’aime bien avoir son retour car lui, a connu les anciens plats. On en discute ensemble. Pareil pour la Quenelle de brochet André Terrail, on l’a revisité. Je fais une quenelle et je la fais poêler sur du pain. Ca donne un côté croustillant. On essaye de moderniser cet héritage. Les clients sont ravis car ils ont retrouvé le Canard, l’animal emblématique de la Tour. Sur la carte, on propose donc le Canard Delair, et toujours un autre canard (soit le Mazarine, soit le Marco Polo, soit le Mac Arthur). Comme cela fait 60 ans que l’on travaille avec la maison Burgaud, j’aimerais aussi avoir notre Canard estampillé Tour d’Argent.
Yannick Franques, qu’est-ce qu’un grand cuisinier ?
Un cuisinier qui trouve des accords. Pour ma part, je suis plus pour deux trois saveurs au maximum, pour que l’on sache ce que l’on mange, mais après on peut avoir une autre vision des choses.
Vous êtes le créateur d’un plat incroyable. Sublime. Mieux que ça : inoubliable. Le Mystère de l’Oeuf. S’est-il mué en Mystère de l’Oeuf de Cane ?
Eh bien oui, j’ai fait un mystère de l’Oeuf de cane ! On a essayé au début, cela a marché, c’était très bien. Cela dit, l’oeuf de cane est un peu plus riche, un peu plus écoeurant, un peu plus compliqué.
Le Mystère de l’Oeuf est un plat magique. Plaît-il aux habitués de la Tour ?
Beaucoup ! C’est mon plat signature. Avec la Langoustine aux graines de Futaba.
Vous avez inventé une trouvaille qui ravit vos clients : les pommes soufflées en forme de goutte, faciles à attraper avec les mains. Les clients ne jurent plus que par elles !
Normalement, les pommes soufflées sont ovales. Avec cette forme de goutte, on la saisit par la pointe, et on la mange à la main sans se salir les doigts. C’est amusant !
On peut aussi déguster une Soupe de lièvre à la Tour. Avec un visuel éblouissant : dans l’assiette s’ébattent des copeaux de châtaigne, des flocons de ravioles de foie gras flottent paresseusement sur un coulis onctueux. C’est savoureux à l’oeil et au palais…
C’est un plat assez marqué, assez faisandé, et c’est puissant au goût. Le foie gras adoucit le côté fort du lièvre. Je fais aussi un Canard à la Royale dans le Menu des classiques : c’est une sauce au sang à base de foie gras et de truffes.
On ne peut qu’aimer votre cuisine parce qu’en plus d’être d’une stupéfiante précision, d’une grande technique, elle est aussi poétique. Vous ne cherchez pas à imiter qui que ce soit, vous inventez vos propres règles...
J’essaye de faire la cuisine qui me correspond, avec le plus de sincérité et d’honnêteté possibles. Je pense que pour parvenir à cela, il faut avoir l’établissement qui vous corresponde aussi. Ici, à la Tour, je vais pouvoir m’accomplir totalement. La Tour d’Argent me correspond parce qu’ici, on est dans les vraies valeurs essentielles, il n’y a pas d’esbrouffe.
Le dessert L’Or Noir fait le délice de vos clients. Ainsi que les Crêpes Mademoiselle. Qui est le Chef pâtissier ?
Le Chef pâtissier était déjà là quand je suis arrivé, mais il est parti durant le confinement, donc le sous-chef a pris sa place. Je suis en train de rechercher un Chef pâtissier.
Quel est votre rêve pour la Tour d’Argent ?
Je m’efforce avant tout d’être réaliste ! Et avant tout, ce que je souhaite, c’est offrir à nos clients de l’amour dans les assiettes et de la joie grâce à notre cuisine. Si ce projet, cette aventure me plaisent tant c’est parce qu’il y a une bonne dynamique, une belle ambiance à la Tour. Mais, il faut y aller étape par étape et ne pas brûler les étapes. Bien sûr, décrocher un deuxième macaron pour la Tour, serait pour moi l’aboutissement de toute une carrière. Il faut aussi que je me stabilise, et j’espère vraiment rester ici. Puisque vous me le demandez, je vais vous confier mon plus grand rêve : si je pouvais marquer mon nom dans l’histoire de la Tour d’Argent, ce serait pour moi, la plus belle récompense et le plus bel accomplissement !
Propos recueillis par Isabelle Gaudé
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