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Nietzsche : « Je ne suis pas un homme, je suis de la dynamite »

Xavier Niel ©Thomas Coex /AFP

Xavier Niel n’est pas un homme, c’est de la dynamite ! Une énergie incomparable, une force irrésistible, une substance explosive qui construit des mondes, bouscule l’ordre établi et met le feu aux préjugés. Il n’a pas son pareil pour faire voler en éclat les conventions, les convenances, les codes et les conformismes. Il a la folie, la fibre créatrice d’un Bill Gates, le génie entrepreneurial d’un Steve Jobs, le charme insolent d’un Julio Iglesias, quelque chose de fraternel en plus. Voilà un homme qui ose le grand écart : fréquenter le peuple et côtoyer les puissants, goûter à la prison et épouser Delphine Arnault, espionner pour la DST et créer l’Ecole 42, s’acoquiner avec un boss de sex-shops et festoyer avec les milliardaires de la tech, s’adonner à la cataphilie et créer Kyutai, passer du Minitel rose à l’empire Free. Niel s’autorise tout, il ne s’interdit rien. Rien ne le freine, rien ne l’arrête. Fou de liberté, cet enfant de Créteil est comme ces Ferrari lancées à grande vitesse, il joue avec les limites. Son moteur, c’est son inépuisable générosité. Cette supériorité morale, dont Xavier Niel n’a même pas conscience tant il a la vanité modeste, lui qui jamais ne se glorifie de rien, l’a poussé toute sa vie à partager, à donner ce qu’il a reçu, à vouloir augmenter les chances d’autrui. Millionnaire à 24 ans, il n’a de cesse, tout au long de son parcours « de rendre ce que la vie lui a donné », « d’utiliser sa fortune pour le bien commun. » Il ne cherche pas le profit, il cherche à en faire profiter les autres. Rendre à la société, aux plus démunis, aux moins favorisés, ce qu’elle lui a offert. Ce besoin d’aider, de soutenir, de rendre service, force le respect. Don de l’amour ? Bonté naturelle ? Aristocratie du coeur ? Sans doute. Aristote a un mot pour désigner cette forme d’amour fraternel : la philia. Et cette philia est le trait le plus marquant du caractère du philanthrope. C’est comme une expansion affective, la tendre diffusion d’une âme bienveillante qui s’attacherait à répandre la joie autour d’elle et à vouloir le bien des autres. Soutenir, encourager, aider, tel est mantra du fondateur de Free. Xavier Niel s’attache plus que personne à « faire fonctionner l’ascenseur social qui ne marche plus en France. » Fort de ce credo, il va soulever des montagnes pour créer l’école 42, une école gratuite, ouverte à tous, pour apprendre le code informatique. Une école sans profs, qui apprend à apprendre, qui aujourd’hui fête ses onze ans de succès et que l’on retrouve sur 55 campus dans 25 pays. Non content d’épauler et de donner de l’espoir aux élèves de toutes les origines sociales, Xavier Niel lancera quelques années plus tard, en 2017, Station F, le plus grand incubateur de start-up au monde et un « symbole de la soif d’entreprendre de ce pays. » Mille start-up réparties sur 34 000 mètres carrés, situées dans la halle Freyssinet à Paris. Une véritable pépinière que la Ville de Paris décrit ainsi : « Un épicentre urbain à la fois créateur d’emplois et d’innovations au service des Parisiens. » C’est peut-être parce que Xavier Niel est ami avec lui-même qu’il est l’ami du genre humain. Peut-être, cherche-t-il aussi à travers sa logique de partage, à réconcilier les humains avec le travail, lui qui comme Baudelaire pourrait dire : « Tout bien vérifié, travailler est moins ennuyeux que s’amuser », le travail s’apparentant à un jeu pour le créateur de Free.

Impossible n’est pas Niel

Non seulement Xavier Niel est généreux mais c’est aussi un inlassable optimiste. Deux qualités rares qui provoquent un mélange étonnant, détonnant, lequel fait merveille dans sa réussite entrepreneuriale. Pour ce businessman sans blues : « Demain sera toujours meilleur qu’aujourd’hui », écrit-il dans son dernier ouvrage qui ressemble à une conversation entre amis Une sacrée envie de foutre le bordel. Dans la bouche de Niel, c’est souvent Nietzsche qui parle : « Souviens-toi d’oublier » recommandait le philosophe. Oublier les échecs, ne se souvenir que des succès. « J’ai un cerveau, écrit Xavier Niel, qui gomme systématiquement les choses négatives, même les pires moments que j’ai pu vivre. C’est pour ça que mes souvenirs de prison sont si étranges : j’ai bronzé, j’ai perdu du poids, je me suis reposé, j’ai bien dormi, j’ai fait du sport. » Sic. Il est proprement stupéfiant de voir comment ce créateur d’entreprises a balayé toute sa vie les obstacles grâce à son optimisme. Pour lui « aucun projet ne peut échouer. Tous vont cartonner ». « Et quand ça rate, j’oublie et je passe à autre chose. Parce que si tu te laisses décourager par tes échecs, ou si tu écoutes ceux qui te disent que c’est impossible, tu ne fais rien. » Cet optimisme c’est son élégance. Une manière d’être au monde dans la légèreté, dans l’insouciance, toujours de bonne humeur, sans plainte ni renoncement. « Quand j’ai créé Station F, j’espérais accueillir 1000 start-up. Et François Hollande, à qui je présente le projet, me dit : « Mais vous êtes sûr qu’il y a mille start-up en France ? » Et bah tu sais quoi, à l’époque, je m’étais jamais posé la question ! Pourtant c’est une question logique, j’aurais dû y penser, faire une étude de marché, ce genre de truc. Une fois qu’on a ouvert, c’était plein à craquer, et il y a beaucoup plus que 1000 start-up en France. Mais quand je sors de l’Elysée, je me dis : « Merde, il a peut-être raison . . . » et je me demande pourquoi je me suis pas posé la question. Mais je me dis aussi que je dois très vite oublier cette question. Parce que sinon je vais jamais créer Station F. » Peut-être est-ce là la recette du bonheur et celle du succès : s’interdire d’être pessimiste mais ne jamais s’interdire de réussir. En somme, on a les limites que l’on s’autorise. « Tout le monde nous disait que ça marcherait jamais (la Freebox avant qu’elle n’existe). Mais pourquoi ça ne marcherait pas de passer la télé ou le téléphone sur un câble ADSL ? La voix et l’image, c’est de la data, ça va marcher. L’équipement n’existe pas ? C’est pas grave, on l’inventera. Il y a un côté naïf, presque enfantin, dans cette façon d’avancer. Je me dis toujours : « Bah, c’est très simple » alors qu’en fait c’est très compliqué (…) Mais cette naïveté m’a permis d’investir dans des secteurs où personne ne va . » Et si la naïveté était une vertu ? Si elle permettait de prévoir l’innovation avant tout le monde ? Si la naïveté n’était rien d’autre qu’une véritable confiance en soi, une confiance quasi aveugle mais souverainement lucide en son intuition ? Une confiance en la vie. Et si les grands visionnaires étaient tous des naïfs ? Naïf ou pas, le prochain de rêve de Xavier Niel sera pour les télécoms. Devenir le premier opérateur mondial dans les télécoms, voilà l’ambition qu’il caresse. « J’ai une carte du monde dans mon bureau. Chaque pays où on est présent est colorié en rouge. Il y a encore beaucoup de pays qui sont en blanc. Si je rachète cinq opérateurs par an, dans les trente ans qui viennent j’aurai rempli ma carte du monde. Je sais pas si je bosserai jusqu’à 85 ans, mais tu vois le truc. Si je fais ça, je deviens le premier opérateur mondial, et le seul à être présent dans tous les pays du monde. C’est ce jeu-là qui me plaît. »

Plus qu’un modèle pour la jeunesse et les entrepreneurs, Niel est un bienfaiteur. Non content « d’avoir rendu du pouvoir d’achat aux Français » grâce à Free, il a passé sa vie à être dans une logique de partage. Il fait partie de ceux qu’Auguste Comte appelait « Les grands serviteurs de l’humanité. » Parti de rien, Xavier Niel a changé le monde et il a servi l’humanité. Pas mal pour un enfant de Créteil qui n’avait pas fait trop d’études !

Gratitude Monsieur Niel.

I.G

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