Aujourd’hui, nous avions rendez-vous avec la directrice générale du Studio Harcourt, Catherine Renard, pour un entretien à bâtons rompus sur l’art du Portrait. Confinement oblige, l’interview a été reportée. Pour patienter, cap sur ces appels de fiction dont parlait Roland Barthes, splendeurs inaltérables, immatérielles, intemporelles, désincarnées que sont les actrices, acteurs et leurs portraits Harcourt. Car il s’agit bien de cela au Studio Harcourt. Dans cette fabrique à rêves, on métamorphose le réel en irréalité. On transmue le vivant en imaginaire. On fait surgir d’un acteur ou d’une actrice « un dieu ou une déesse, éternellement jeune, fixé à jamais au sommet de sa beauté. » Un être éthéré, évanescent, dont l’apparence immarcescible, à l’opposé du Portrait de Dorian Gray, échappe au temps, au vieillissement et à la mort. Non content de fixer l’éternité dans un instant, le portrait Harcourt offre au comédien une carte d’identité, une intronisation dans le métier d’acteur, et une place dans le Panthéon des Stars. Il lui accorde aussi la chance de s’inscrire dans cette mémoire mythique de la photographie, celle qui appartient au plus ancien et au plus célèbre studio de photographie. Reconnaissance suprême, véritable estampille, le portrait Harcourt fait penser à cette empreinte que les acteurs américains laissent sur Hollywood Boulevard. Histoire d’immortaliser leur passage au cinéma et sur terre. Loin de l’inflation narcissique actuelle où chacun s’expose, s’exhibe, se donne à voir, s’auto-séduit en se contemplant, le Studio Harcourt apparaît comme un lieu de résistance. Ici, la vanité n’est pas de mise. On ne vient pas chercher dans son Portrait Harcourt le quart d’heure de célébrité prophétisé par Andy Warhol, on vient chercher quelque chose qui vous échappe, une part secrète, inconnue, mystérieuse, inconsciente de soi, mise en lumière par l’objectif du Studio. Où l’on comprend mieux que la surface est le miroir de la profondeur. Dans ce clair-obscur, la psyché se révèle…
Isabelle Gaudé