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Xavier Wttrwulghe

« Je veux rendre l’irréel réel »

C’est un photographe dont le regard est libre. Ses instantanés sont à son image : affranchis de toute contrainte. Imprévisibles, insoumis, insouciants et profondément humains. Car Xavier Wttrwulghe ne se soumet à aucun code. Il les invente. Il capte l’invu. Revitalise l’irréel. Dissipe les frontières entre l’invisible et le visible. Le jamais-vu et le trop montré. Incite à la révolte. Mobilise nos regards. Réinvente le réel à sa sauce. Résultat : ses photos impriment en nous de jolies émotions. Voyage dans un univers audacieux. 

Vous êtes un artiste plasticien et un photographe qui réalise des retouches créatives et des images visuelles. Votre travail est original et souvent surprenant. Que cherchez-vous à atteindre à travers ces photomontages, ces métamorphoses ?

Lorsque je réalise une photo, je recherche surtout à créer de l’émotion. La photo doit surprendre, étonner, redonner l’émotion de la présence vivante. Elle doit nous faire pénétrer au cœur du vivant, du vital.

Cherchez-vous à retoucher le réel pour le recréer ? Pour vous en extraire ou pour proposer une autre vision du monde ?

Je veux surtout que le résultat n’ait pas l’air factice. Beaucoup de personnes m’interrogent en me demandant comment j’ai fait pour amener ce rhinocéros sur les Planches de Deauville. Cela m’amuse et je me dis : T’as réussi ! Je veux arriver à rendre l’irréel… réel !

Il y a dans toutes vos images, un sens de la composition indéniable. Vos compositions sont toujours soignées, recherchées. Comment les travaillez-vous ?

Je travaille avec de nombreux programmes informatiques. Avant cela, je dessine beaucoup et je crée un storyboard afin de me projeter dans un univers décalé. Lorsque j’ai l’idée, je recherche aussitôt un endroit bien particulier pour mes décors.

Vous avez réalisé une photo incroyable : celle d’un rhinocéros marmorisé sur les Planches de Deauville. Pouvez-vous nous raconter la genèse de ce cliché ?

Lorsque j’ai fait ma première expo à Deauville en mars 2018, je suis tombé littéralement sous le charme de cette ville. Alors je l’ai immédiatement immortalisée avec mon appareil photo. Je savais que j’avais en stock une image des Planches. Ne restait plus qu’à trouver ce que j’y allais y mettre dessus. Je suis pour la protection des animaux. La menace qui plane sur les rhinocéros m’affecte beaucoup. Lorsque j’ai réalisé le cliché du Rhinocéros blanc, au moment où l’obturateur de mon appareil s’est déclenché, en une fraction de seconde, j’ai vu l’image de ce rhino venant vers moi sur les Planches de Deauville. Et je me suis dis « tu l’as ta photo ! »…. Neuf mois plus tard le résultat est là, au salon ART SHOPPING de Deauville.

Vous vous êtes spécialisé dans la photo animalière décalée. Parmi vos clichés, on peut admirer un raton laveur géant placidement installé sur un pont qui surplombe une autoroute. Vouliez-vous signifier par là qu’on a dénaturé la nature à force de l’urbaniser et que la vie sauvage, les animaux n’y ont plus leur place ?

Oui, tout à fait. Grâce à cette série, j’ai voulu montrer que l’homme a construit des villes, des autoroutes, des espaces bétonnés et pourtant les animaux sauvages nous disent ok très bien, vous avez bâti tout cela, mais nous on vient quand on veut, on y a et on y aura toujours notre place !

La route est un thème récurrent chez vous. Il y a beaucoup de chemins, de routes, d’autoroutes dans vos photos. La photo c’est un instantané, la route c’est la durée (celle d’une vie). La route représente aussi la vitesse, le mouvement. Mais aussi la fièvre de la liberté (celle de Jack Kérouac et son roman  » Sur la route »). Ni bornes, ni limites. Pour vous, la route c’est la vie ? Ou est-ce la révolte car rien n’est tracé ?

Les chemins, les routes, j’adore cela. Ces lignes, ces perspectives donnent beaucoup de dimensions à l’image. Alors oui, elles sont souvent cassées, brisées, déformées mais la vie est comme cela… semée d’embûches. Oui je suis un peu révolté, et ce par rapport à mon enfance qui n’a pas été facile. No comment…..

Dans vos clichés, la route est souvent déformée, démolie. Vos routes ressemblent aux montres de Dali, elles symbolisent le temps. Or la photo arrête le temps. Cartier-Bresson disait : « La photographie peut fixer l’éternité d’un instant ». Pour vous, la photographie, est-ce une façon de conjurer la mort ?

J’adore Dali, Magritte, Picasso ! Ces grands artistes déformaient aussi les objets ou les personnages et j’ai toujours trouvé cela fascinant.

Vivre pour le photographe que vous êtes, c’est regarder, capter, refléter, s’imprégner, dévoiler le secret du monde ?

Je crée des images pour que l’on ait un autre regard sur ce que l’on a l’habitude de voir. A force de courir dans la vie, métro, boulot, dodo, on a des oeillères et on ne voit plus autour de nous. Rêver éveiller, c’est important. On a besoin de cela.

La photographie, pour vous, est-ce un langage ? Que cherchez-vous à exprimer ?

Comme je l’ai dit, je cherche à exprimer une émotion, à transporter les gens dans une autre vie, une vie parallèle.

Pourquoi êtes-vous devenu photographe ?

Pour la passion de l’image, l’illustration, l’expression, l’émotion que l’on peut transmettre aux autres.

Vous êtes photographe mais vous faites aussi de la peinture. Baudelaire disait de la photographie que c’était « la servante de la peinture ». D’accord avec lui ?

J’ai fait mes études aux Beaux-Arts de Bruxelles. Je pense que peinture et photographie sont liées. Je fais de la peinture lorsque j’en ressens le besoin, cela correspond à des périodes bien distinctes de ma vie. Mais je n’arrêterai jamais de peindre ni de créer. Lorsque les gens viennent régulièrement à mes expositions, ils sont toujours surpris car, à chaque exposition, il y a toujours quelque chose de différent…

A travers vos photos se dessine votre personnalité. Etes-vous un homme farouchement libre, imaginatif, affectueux comme le sont vos deux zèbres tendrement enlacés, non conventionnel comme le crient toutes vos photos, et plein d’humour comme l’est votre travail (par exemple comme ce bateau encavé dans la mer) ?

Oui mes zèbres représentent l’amour éternel, l’amour sans arrière-pensées. Je suis très amoureux de ma femme, nous sommes inséparables comme le sont ces deux zèbres…

Votre cliché « Gorille dans la brume » est sublime. Vos photos sont émouvantes, poétiques, et celle-là l’est tout particulièrement. On dirait que vous étiez là au premier matin du monde à capter l’essence de la beauté animale…

« Gorille dans la Brume » est bien sûr une mise en scène. Il s’agit d’un gorille Silverback en captivité que j’ai voulu remettre dans son milieu naturel. Comme s’il était heureux et libre…

Votre regard a-t-il évolué au fil des années ?

Bien sûr. Je pense que l’on évolue tous au fil du temps. Quelle soit positive ou négative, la vie a toujours un impact sur tout un chacun. Moi je me sers du bon et du moins bon (car il n’y a pas de mauvais) pour avancer. Mais je reste toujours positif.

Un photographe est-il un homme qui montre ce que les autres ne remarquent pas ?

Disons qu’un photographe en a la possibilité. Reste à savoir s’il va le faire ou non.

Vous avez reçu un Silver Award en 2018 pour vos photos. Que couronnait-il ? Dites-nous en plus…

Je me suis inscrit sur le site Artmajeur qui est un site de vente d’art en ligne. Au bout de trois mois, grâce aux ventes réalisées, aux vues et à la qualité du travail, le jury m’a octroyé un Silver Award. Je suis content.

Sur quoi travaillez-vous actuellement ? Quelles seront vos prochaines expositions ? Y-a-t-il une galerie d’art parisienne qui expose vos clichés ?

J’ai beaucoup de projets en tête mais je ne peux pas encore vous en parler… Mes prochaines expositions auront lieu à La Baule, à Paris Carrousel du Louvre, à Lyon, Reims, Mulhouse, Bruxelles, en Suisse, à Monaco, etc. Je ne peux pas toutes les citer car il y en aura encore beaucoup ! Je n’ai pas encore de Galerie sur Paris, mais c’est dans mes projets !

Propos recueillis par Isabelle Gaudé

Site: www.studio-flash.eu

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